Printemps 2003



Printemps 2003
Mon PC portable s'est fait voler vendredi dernier, tout cadenassé qu'il était. Avec lui disparaît un mois de journal écrit à Toulouse, durant la guerre en Irak que j'ai suivie assidûment sur CNN et Euronews depuis ma chambre des Citadines.
Bien entendu, je n'ai pas envie de tout réécrire. Alors, je résume.
Toulouse : jolie ville. Semble être une ville étrangère mais environnée d'une campagne française. Gens sympa.
Premier WE, rencontre de Rémi (du forum catholique) à Montpellier. C'est un garçon normal d'à peu près mon âge.
Second WE, visite de la cathédrale Ste Cécile d'Albi, puis de Conques et de son trésor ; deux choses magnifiques. Je pousse jusqu'à Entraygues sur Truyère, tout proche du circuit auvergnat que j'avais parcouru en 1989, puis Espalion. Trou de Bozouls et Causse Comtal au retour vers Rodez.
Troisième WE à Cordes. Vraiment magnifique, un croisement entre Malaiac (les rues en pente) et Minas Tirith (les cinq enceintes concentriques). Visez un peu la référence pop culture.
Quatrième WE dans le Comminges (St Bertrand, St Just de Valcabrère) ; traversée des contreforts des Pyrénées, pour finir à En Calcat. Oui, ce n'est pas la porte à côté. La seule chose qui survit de ces pérégrinations est le compte-rendu que j'en ai fait sur le forum de Rémi, agrémenté de descriptions des messes St Pie V à la chapelle St Jean Baptiste (ralliée, pas terrible), de la Paul VI en latin (même endroit, messe zombie), de la St Pie X à la chapelle du Férétra (bonne mais stéréotypée) ; ainsi que des vigiles du dimanche de la passion à Rangueil chez les Dominicains, et des vigiles du même dimanche chez les bénédictins d'En Calcat dans leur église néo-romane.

Jeudi saint à St Nicolas du Chardonnet et St Eugène

Messe à St Nicolas du Chardonnet, archi-pleine et suivant les canons liturgiques (durée 2 heures bien pleines). Kyriale polyphonique, un gloria transportant, sermon classique et pas trop sopo, et dix minutes de queue devant le reposoir. C'est Paris, messieurs dames ! Chorale OK, mais seules les femmes chantent le grégorien. Les hommes aux pieds lavés sont en aube, ce qui est assez pertinent. (Aujourd'hui, à Fontgombault, tous les moines sont en blanc dans le choeur pour la messe.) Kyriale 8. Ils auraient pu trouver autre chose.


Pizza sur les boulevards, et à 23 heures, office des ténèbres à St Eugène, déjà commencé depuis une heure. Nous trouvons l'église semi éclairée, et dix laïcs en soutane et surplis dans le choeur ; l'ambiance est pour ainsi dire monastique et un livret fort bien fichu a été composé pour l'occasion. Henri de Villiers fait tourner la boutique avec maestria, et comme s'il avait été pré chantre depuis dix ans, se lève, va pré-entonner chaque antienne devant le clerc nécessaire, la poursuit au milieu du choeur, va se rasseoir. Indépendamment, nous avons un clerc à l'éteignoir qui fait son office (un peu trop tôt à notre goût), et donc un grand chandelier à quinze cierges. Très liturgiquement toujours, la neuvième leçon est réservée au plus digne du choeur. Malheureusement, il y avait à peu près autant de tons de leçons que de lecteurs, pour ce que j'en ai entendu ; la septième était sur un ton improvisé, avec les flexes un peu n'importe où ; la huitième était lue sur le ton de l'épître, et la neuvième sur un ton à peu près correct.
Les nocturnes étaient chantés, un peu traînants peut-être, mais quoi ! « on n'est pas des moines ». Il est néanmoins utile de recommander l'écoute du disque de Solesmes sur les vêpres et les complies du dimanche par dom Gajard pour voir ce que c'est qu'une bonne psalmodie.
Ce sont de même les limites du choeur qui ont du commander de ne pas chanter les répons grégoriens mais une variante en faux bourdon, agréable à entendre mais qui a servi pour tous les répons. Voilà donc une voie de progrès pour l'année suivante : préparer au moins trois répons en grégorien, disons pour le Vendredi : Caligaverunt (parce qu'il est joli), Tenebrae (parce qu'il est célèbre), et Sepulto Domino (parce qu'il est facile).
Pour des questions de longueur et de rythme, je recommande aussi de chanter un voire deux nocturnes recto tono ; cela permet de se concentrer sur la psalmodie ; on pourra chanter les antiennes si cela fait plaisir.
Les vraies réserves, je les garde pour la fin. Après un Proprio Filio massacré (le SED est un si, pas un do) et un benedictus en faux bourdon (pourquoi pas ? et pourquoi pas l'orgue le Vendrdi Saint ?), l'obscurité totale se fait dans l'église, avec le dernier cierge allumé caché derrière l'autel conformément aux rubriques. Le Christus est chanté de mémoire. Mais que vient faire là ce miserere ? Vous l'avez compris, Henri et ses potes ont voulu jouer la carte du maximalisme et ont réincorporé dans l'office des parties retranchées depuis au moins la réforme de Pie XII. Le miserere recto tono est donc revenu, et après lui le fracas sur les stalles. Dom Guéranger témoigne de cette pratique dans son Année Liturgique ; elle ne doit toutefois pas être guère plus ancienne. Selon les auteurs, elle symbolise le bruit du tremblement de terre qui suivit la mort de Jésus (figurée par la disparition du dernier cierge allumé). On ramène ensuite ledit cierge, toujours allumé, sur le chandelier, ce qui figure la résurrection.
Faut-il préciser que nous n'avons pas pensé tellement au tremblement de terre qu'au léger ridicule que représente en 2003 un tel rite ? C'est pour de telles raisons non plus qu'on n'étend plus depuis le XIXème siècle un drap mortuaire sur les moines qui font leur profession solennelle : parce que le symbole, tout frappant qu'il est, est un peu creux et ne signifie pas vraiment ce que l'Eglise veut dire. « Mort au monde », d'accord mais ce n'est pas là l'essentiel, et surtout ce n'est pas là l'occasion d'une cérémonie funèbre. Au contraire, la profession a quelque chose d'une joie rentrée.
Il en est de même pour les Ténèbres. Ce sont des offices nocturnes et affligés, où les psaumes sont lugubres (cf. le psaume 87, chanté Vendredi ET samedi), souvent ils sont mis dans la bouche du Christ. Les lamentations de Jérémie sont de la même eau : quoniam facta est desolata civitas plena populo : l'Eglise met dans sa bouche et dans les bouche de ses fidèles les paroles et les sentiments du Christ au moment de consommer le calice. Jeudi, c'est Gethsémani, Vendredi, c'est la croix, avec des répons très expressifs, et Samedi c'est le relatif apaisement du tombeau. Bref, les Ténèbres, c'est le « ground zero » liturgique, le micro mis dans la tête du Christ, et les événement extérieurs filtrant comme en écho, avec toutefois une petite touche de doctrine, sur le mal (St Augustin le jeudi), sur l'Eucharistie (St Paul le jeudi), sur la responsabilité des Juifs (St Augustin le vendredi), sur le sens du sacrifice (lettre aux Hébreux le samedi). Le chandelier figure bien cela, que le calice doit être bu jusqu'à la lie, et que le Christ n'a pas simulé mais pris toutes les opprobres.
Posons alors la question : est-ce bien opportun de claquer son livre sur les stalles à ce moment-là ? NON, bien sûr. D'abord parce que ça fait du bruit, à un des moments les plus inappropriés de l'année liturgique ; ensuite parce que rien d'autre dans cet office n'est figuratif ; tout est « psychologisé », intériorisé ; ensuite parce qu'en 2003 cela frise le ridicule (imaginez que vous emmenez un ami pour la première fois à l'église à cette occasion). Et enfin parce que ça n'est plus dans les livres, et qu'on respecte les livres qu'on a. De même le miserere rajouté est superflu et doit être coupé ; il y en a déjà un à Laudes.

Il y a bien des années déjà, j'ai essayé d'instituer dans une paroisse tradi un office de Vêpres. J'ai préparé donc des livrets avec l'ordinaire du dimanche (et ils étaient bien moins beaux que ceux des Ténèbres à St Eugène), et des feuilles avec le propre de chaque dimanche. Malgré une annonce en chaire de cet office chaque dimanche, nous nous retrouvions cinq ou six le soir, plus quelques mamies pas tradi mais qui étaient passées une fois par hasard et appréciaient d'écouter les vêpres à distance. Nous avons donc tenu six mois à cinq ou six. Pour Pâques, le prêtre desservant le lieu nous avait promis son concours et un salut du St Sacrement, qu'il nous refusa sous un prétexte futile au moment d'officier. Et au début de l'été, un moine ami d'un des paroissiens vint pour la journée. Le soir même, toute la ville ou presque se découvrit un engouement pour l'office divin, et il y eut soixante personnes aux vêpres présidées par le moine. La semaine d'après, nous étions retombés à cinq ou six et je décidai d'arrêter l'expérience.
Ce n'est donc pas facile, de tirer des tradis de chez eux pour autre chose que la grand'messe ; surtout lorsqu'ils vous vouent une hostilité sans faille et que le clergé se désintéresse de ce qu'il devrait faire à votre place. Forte de cette expérience, je me dois de saluer qu'il y ait, pour les trois jours du triduum, un office de Ténèbres de deux heures trente, chanté par dix personnes, et suivi par vingt autres jusqu'au-delà de minuit. C'est aussi Paris, messieurs-dames ; et c'est plus d'efforts que vous n'imaginez. Voilà pourquoi je suis fort enclin à oublier les fausses notes, les répons pas chantés ou les dérapages mytho de la fin pour féliciter Henri et ses boys d'avoir monté cela ; et les vingt justes qui ont sauvé la cité (dont moi) pour y être allés. 3/5, à améliorer l'an prochain.

Avalon, de Mamoru Oshii

Après avoir réalisé des mangas aussi remarqués que Ghost in the shell et Jin Roh, l'auteur renoue avec les acteurs réels, pour nous offrir un film extrêmement léché, où tous les plans sont retravaillés, image et son. « Avalon », c'est un jeu illégal qui développe une addiction chez nombre de ses joueurs. Au contraire de la plupart qui jouent en équipe, Ash est une solitaire, qui part à la recherche d'un niveau caché. Au fur et à mesure de l'histoire, développée sur un rythme très lent, on en apprend un peu plus sur son passé de joueuse. Mais l'histoire n'est pas ce qui est le plus important dans ce film construit plus comme un morceau de musique que comme un roman ; le retour des thèmes, des images ; les jeux de miroir, les ambiguïtés entre la réalité et le monde virtuel du jeu servent de prétextes au réalisateur pour jouer avec les images et les idées.
Dit comme cela, Avalon semble un bouzin d'avant-garde français. Mais il vaut bien mieux que cela. C'est sans doute un ovni, encore que nombre d'oeuvres japonaises surprennent autant ; disons que c'est comme un bon manga mais filmé dans des décors et avec des personnages réels.
Pour l'ambiance (le tournage a eu lieu en Pologne, à Wroclav et Warsovie), on peut évoquer les Ailes du Désir de Wenders (pour le côté Berlin décrépi) mais aussi la Double vie de Véroniquede Kieslowski, deux films musicaux s'il en est ; Kieslowski avait inventé un « concerto pour hautbois de Van Budenmeyer » pour la cause ; Oshii filme en polonais et montre également une scène de concert. En somme, un film très léché, agréable à voir, étrange mais juste ce qu'il faut, et hantant.

DVD : le voyage de Chihiro

Le voyage de Chihiro de Whatshisname Myazaki (déjà glorieux auteur de _Mononoke_, entre autres). Une famille japonaise déménage ; deux parents et leur fille Chihiro ; à force de se perdre, Chihiro se retrouve séparée de ses parents et plongée dans un monde étrange peuplé d'esprits où elle se voit forcée de travailler dans un établissement de bains.
Il serait sans doute inutile de chercher précisément ce qui fait le charme envoûtant de _Chihiro_. L'étrangeté du lieu, la douceur de la narration n'y sont pas étrangers ; et quoique résolument bizarre et parfois humoristique, le film ne lasse pas et soutient l'intérêt. La grande beauté des dessins y est sans doute aussi pour quelque chose ; l'établissement de bains est comme une sorte de Mont Saint Michel au-dessus d'une plaine qui peut se transformer en mer en une nuit. Il y a une méchante sorcière avec un énorme bébé grotesque et trois têtes barbues qui rebondissent ; des araignées porteuses de charbon qui ne sont pas sans rappeler les sylvains de Mononoké. En quelques mots : fantaisie, divertissement, raffinement, et un peu de romance et d'humour. Les japonais ont bien de la chance d'avoir un imaginaire pareil. La musique aussi est bien. Chihiro est le digne successeur de Mononoké, en un peu plus léger et moins dramatique. Fortement recommandé.

DVD : Zora la Rousse

Printemps 2003
Je vois avec plaisir &... et j'achète sur le champ &... le DVD de Zora la Rousse qui vient de sortir. Pour qui connaît, c'est un morceau d'anthologie ; et pour le Nelly encore plus. A l'origine coproduction franco-allemande, censée se passer sur la côte dalmate mais avec des acteurs serbes pour la plupart ; _Zora la rousse_ raconte les aventures d'une bande de galapiats dirigées par une rouquine de 14-15 ans. La série a été diffusée quelques fois sur « récré A2 » (à l'époque, cela ne s'appelait pas encore « club Dorothée ») à une époque où je n'avais pas la télé à la maison ; je n'en ai donc vu que quelques épisodes, trois ou quatre en tout, la plupart à ***, et peut-être un ou deux supplémentaires à ***. J'en ai gardé une forte impression et cela a sans doute été pour beaucoup dans mon envie d'avoir une télé à ***. Aujourd'hui encore, je peux fredonner la chanson du générique. Inutile de dire que lorsque la télé est arrivée, en 87, Zora la Rousse n'était plus diffusée. Je n'ai donc jamais su comment cela se terminait. Je me souviens tout particulièrement d'un épisode (je sais maintenant que c'est le second) où l'un des gamins passait une épreuve qui consistait à planter rapidement un poignard en terre entre chacun de ses doigts tour à tour.
Il y a quelques années, j'avais découvert, au détour du stand de Christian Lamoureux à la foire aux bouquinistes, que Zora la Rousse était à l'origine un roman pour la jeunesse allemand, qui avait été édité en français par le Signe de Piste dans la collection « rubans noirs ». Maintenant que je redécouvre avec plaisir la série, je trouve en effet qu'elle a un tour Signe de Piste assez marqué.
Bref, vive le DVD et son effet petite madeleine. Il parait que l'actrice principale vit aujourd'hui à Paris ; elle serait prof de français. Heureusement que Sombreval est casé..
La fiche de présentation

Des nouvelles du forum (mai 2003)

Le forum de Rémi a vu récemment le compte-rendu de Nelly sur les conférences sur la gnose d'Etienne Couvert, Arnaud de Lassus et Philippe Ploncard d'Assac. Couvert et Lassus sont plus modérés en vrai que dans leurs écrits ; et surtout ils disent la même chose et exhibent les mêmes références que lorsque je les lisais en 96. Ploncard, lui, fait le procureur, donne des noms (y compris l'abbé de Tanouarn et l'abbé Célier) et dénonce la pénétration de la « gnose » dans les milieux catho-fachos, essentiellement matérialisée par le GRECE et le club de l'Horloge. Là encore, le propos n'est pas neuf ; mais la manière qu'à Ploncard de réclamer des têtes, d'avoir la nostalgie de Vichy, dégouline de haine pour ce qui n'est pas lui, et spécialement de haine antisémite, ce que j'ai du mal à avaler. La franc-maçonnerie est « la synagogue de satan », selon je ne sais plus quel pape d'il y a quelques siècles ; « cela dit bien son origine », commente Ploncard. Entendez : le diable et ses collaborateurs les Juifs. Je peux garantir que la digne assistance a parfaitement compris. Afin d'échapper à la loi Gayssot et à quelques autres, Ploncard ne peut pas parler comme Drumont ; il pose des questions, il insinue, pour faire passer son message. « cherchez à qui cela profite », « suivez mon regard » font partie de son arsenal vocal.
Ce qui me hérisse proprement, c'est cet acharnement anti-juif d'un autre âge, et cette nostalgie sans remords de la collaboration, c'est-à-dire de la délation et d'un des plus importants homicides organisés en France. Je le dis donc sans ambages sur le forum de Rémi, où il m'est répondu que je m'acharne sur une période dont tout le monde se fout, que l'avortement tue plus que le nazisme, et autres sophismes de la même eau. A vrai dire, je ne m'indigne pas tant sur les faits, qui commencent en effet à accuser leur âge, que sur le fait qu'on puisse regretter cette période, rêver d'y revenir, minimiser ses crimes, ré-épouser l'esprit de l'époque sans rien y changer.
Les mêmes qui me reprochent de m'attarder sur le passé resteraient-ils de marbre à l'évocation de l'exécution de Louis XVI ou des massacres de Vendée à la même époque ?

Mon compte-rendu me vaut 140 visualisations, un record personnel, autant que mes aventures toulousaines.

Dans le même moment, « Tintin », un liseur belge, a décidé que du Paul VI avec du faste, c'était aussi bien que du St Pie V ; il a également décidé de faire profiter tout le forum de sa découverte. Il veut reprendre le « bref examen », le réfuter. Je lui réponds donc que cela a déjà été fait (j'ai moi-même connu ce zèle il y a longtemps) et, l'inspiration s'en mêlant, j'esquisse le programme du tradi aujourd'hui : séparer les bons des cons, et prouver notre respectabilité à l'épiscopat. Peut-être l'avais-je écrit en des termes d'une force inusuelle pour le forum ? 150 visualisations aussi sec, et des réactions pour le moins passionnées. « que de la gueule » disent certains, alors que d'autres semblent se féliciter que quelqu'un dise enfin tout haut ce qu'ils pensaient. Mais était-ce si difficile à dire ? Mon mot d'ordre est donc : prenons les bons tradis, réintégrons-les dans l'Eglise, et laissons les autres dehors. Plusieurs signes, notamment romains, laissent penser que c'est le bon moment pour le faire ; on a une « fenêtre de lancement » en quelque sorte.

Un lecteur du forum ne me pardonne pas, quant à lui, d'avoir qualifié Mgr Williamson (lefebvriste) de « doux dingue », et ne me lâche plus pour que je me justifie. Mais faut-il prouver quelque chose d'un évêque qui écrit en lettre pastorale que les femmes ne devraient pas aller à l'université ? J'ai donc surnommé ce lecteur le « Serge Klarsfeld du forum », chose qu'il n'apprécie guère non plus.

La rumeur du moment, c'est qu'au cours de la messe St Pie V célébrée par le cardinal machin chouette à Ste Marie Majeure le 24 mai prochain (la première du genre dans une basilique romaine, semble-t-il ; et la première par un officiel du régime), l'excommunication contre la Fraternité St Pie X serait levée sans contrepartie ; d'autres rumeurs encore plus folles font état de l'institution d'un bi ritualisme : tout prêtre pourrait désormais choisir entre le missel de 62 ou celui de 69 librement. Ces rumeurs ont été démenties ; mais j'y trouve quelque chose d'encourageant ; il n'y a pas de fumée sans feu &... et l'on n'a jamais entendu cela en trente ans.
Chez les lefebvristes, la réaction est mitigée. Certains se félicitent, d'autres exigent que Rome « reconnaisse ses erreurs », et d'autres veulent persévérer dans le schisme coûte que coûte. D'autres rumeurs (imprimées) dressent la liste des évêques qui se soumettraient, et du seul qui ne se soumettrait pas, Mgr Williamson, comme on l'aura deviné.

Les beaux décors des GR parisiens

Randonnée avec Cévanne et son mec entre Pontault-Combault et Chelles. Nous observons l'immobilier environnant. Alain me donne aussi la raison pour laquelle il fait plus vite chaud que froid chez moi : les voisins chauffent (donc ça ne refroidit pas) ; le béton emmagasine le rayonnement et le restitue (donc ça chauffe en été, même si les nuits sont froides et même si on aère).
Si Pontault-Combault est une banlieue pavillonnaire propre, Noisiel ne peut en dire autant. C'est du Palavas-les-Flots sur béton construit dans les années 80, avec une population de femmes de ménage et de racaille, malgré la présence voisine de Champs sur Marne et d'un vieux noyau villageois ; de même que Lognes qui fait plus banlieue résidentielle à l'américaine.
Nous sommes obligés de traverser un campement de romanichels à la sortie. C'est vraiment affreux, sale, insalubre. La traversée ne dure que deux minutes, où il faut éviter les chiens, ne pas regarder les gens avec insistance, répondre bonjour à ceux qui disent bonjour, supporter leurs gueules à la limite de la mutation génétique (les romanichels de _Dobermann_ sont très stylisés, croyez-moi) et fuir le haut-le-coeur permanent. L'enfer doit ressembler à cela.
Nous traversons donc les voitures désossées, les gars qui bricolent leur scooter, et même une chèvre, pour nous retrouver dans le sous-bois, qui s'avère rapidement être leurs chiottes à ciel ouvert. Le haut-le-coeur continue. Derrière, il y a à peine un chemin, qui débouche sur un sous-bois ravagé : personne n'a rien fait depuis la tempête de 99 ; nous sommes perdus et devons nous guider sur le soleil. Heureusement, cela marche et nous retrouvons le GR après une demi-heure de petit-scout.
Les européens, lorsque je mentionne le Brésil, sont nombreux à poser spontanément des questions sur les favelas ; mais les favelas sont faites de maisons bricolées tant bien que mal ; ont souvent l'électricité et même parfois l'eau courante ; leur sollicitude ne s'étend pas à ces campements de caravanes où le sol est jonché de pièces de voiture désossées, de vêtements pourris, d'ordures et de verre brisé, et qui sont autrement plus près d'eux et autrement plus... euh... pittoresques. Cela fait déjà le second sur ce GR.
Heureusement, le reste de la promenade nous emmène sur les bords de la Marne, notamment près de l'usine Menier qui est un bijou d'architecture industrielle ; puis à Champs où un parcours de kayak a été aménagé, et enfin à Chelles ou nous reprenons le train.

Marc Ferro – Histoire de France

Je poursuis la lecture du livre de Marc Ferro, qui m'apporte des éclairages insoupçonnés sur l'histoire moderne et contemporaine, notamment sur les rapports entre l'Eglise et les nations européennes, qui met en lumière la formidable volonté de puissance et de pouvoir qui a animé l'Eglise depuis le Moyen-Age (depuis Grégoire VII, pour marquer une date), et qui a commencé à décliner avec l'émergence des nationalités, c'est-à-dire lors de la Guerre de Cent Ans. Je ne sais si cette analyse est pertinente, en tout cas elle est cohérente, et permet d'inscrire les prétentions ecclésiastiques du XIXème siècle dans une continuité, et de donner à l'Eglise un rôle politique qui s'explique mal autrement. Accessoirement, elle permet de rattacher à quelque chose les thèses traditionalistes contemporaines, et donc de les démonter plus efficacement. Le tradi de base réclame la ré-instauration d'un certain nombre de choses (par exemple l'abolition de la liberté religieuse). Sa justification est de dire que l'Eglise, qui ne peut se déjuger, a toujours refusé la liberté religieuse, au moins jusqu'au Concile Vatican II où elle la tolère, ou plutôt l'autorise en changeant le sens des mots « liberté » et « religieuse ».
Il est donc intéressant de voir depuis quand elle la refusait, en quels termes, sur quels justifications... L'histoire des rapports entre la France et l'Eglise est particulièrement intéressante à cet égard puisqu'elle a été houleuse y compris sous l'Ancien Régime (cf. le brûlot contre la commende au début de la vie de Dom Guéranger par Dom Delatte).
L'auteur a aussi des mots durs contre la peur de l'URSS qui animait les politiques français de la fin des année 30 et qui est la cause, selon lui, des complaisances envers l'Allemagne ; on espérait s'allier, ou ne pas s'aliéner cette dernière, pour la retourner contre le péril communiste ; on sait ce que ce calcul foireux a donné.

Antimilitarisme primaire

Ma salle de sport préférée est prise d'assaut par une horde de militaires qui sont en séminaire au Sofitel pour QUINZE jours, et logés là avec l'argent de mes impôts. Il n'y a pas un équipement disponible ; et je dois me taper dans le sauna une conversation bruyante entre deux d'entre eux, commentant les qualités des divers intervenants de l'après midi. Que cela ne m'intéresse pas, que le sauna ne soit pas le lieu indiqué pour les conversations bruyantes, il n'en ont rien à foutre. Quelle engeance !


Le soir, dîner toulousain avec mon pote lieutenant G *** dans un restaurant de la rue St Dominique. Le bla bla habituel. Le patron du restaurant est un bonapartiste ardent qui m'entretient sans complexe de la possible substitution d'un cadavre anonyme à celui de l'empereur dans son tombeau des Invalides.
Je raconte à G l'incident du sauna ; il reste pensif un instant puis me dit « lorsque je serai sorti de l'armée, je devrais peut-être ouvrir un sauna gay ». Hein ? Quoi ? « Ben oui, il parait que c'est très rentable ». Entre ça et T qui me raconte qu'il a eu du mal à bander devant sa pute l'autre soir à Rotterdam, il y a des fois où je suis content d'être là.
En attendant, j'ai réservé une grosse semaine au « Sheraton New York and towers » en Août, à deux pas de Broadway. J'ai l'avion, j'ai l'hôtel, il ne me reste plus qu'à gérer la partie Oklahoma du voyage.

Une époque est finie

Dimanche, T et moi allons au bar du Concorde St Lazare boire un verre (porto vintage pour moi, excellent) et fumer un cigare. Et causer de l'appartenance maçonnique probable de P.L.
Nous buvons également à la santé du Concorde qui a fait son dernier Paris &... New York aujourd'hui... sans moi. Espérons que bien vite d'autres porteurs un peu glamour apparaîtront

6 juin 2003 – Fausse sortie de Nelly

Le niveau du forum de Rémi baisse de plus en plus. E.A. tient son rôle de pit bull idéologique, et deux nouveaux venus, Geronimo et Pothin, tiennent le rôle du catho tradi et républicain et judéophile à la fois. Inutile de dire qu'ils ont fort à faire.
Constatant que mon analyse du sermon du Cardinal Castrillon Hoyos (sur le « droit de cité » du rit de St Pie V, et non plus de la tolérance « large et généreuse ») passionnait beaucoup moins que telle ou telle autre futilité, j'ai posté que je n'avais plus envie de gâcher mon temps à écrire pour un public peu intéressé, que je cessais de poster et que je reviendrais lorsque j'en aurais envie.
L'accueil n'a pas été terrible. A part un lecteur qui a compris le sens de ma démarche et dit « j'aime bien ce côté diva capricieuse qui s'en va », et un autre qui dit « restez sinon le forum va tomber un peu plus bas », le reste n'est qu'hostilité. On m'accuse de solipsisme. On me reproche de remplacer la substance par le style. Fort bien. En bonne Nelly que je suis, je n'en ai rien à cirer, de ces commentaires. Mais lorsqu'ils viennent de gens qui puisent leur doctrine dans La Franquerie et « la rose de Notre-Dame », c'est vexant. J'aimerais avoir des contradicteurs à la hauteur.
J'ai eu un mot privé de ***, qui me transmet les amitiés de *** (je ne connais ni l'un ni l'autre) et se pose en repreneur du flambeau de Nelly. Il le fait avec une certaine vigueur qui me plaît bien. Oui, dit-il, on peut être républicain et catho. Oui, Vichy a été un sale régime. Oui, la théorie de l'évolution est recevable. Non, le monde n'a pas six mille ans. Non, la Genèse n'est pas à prendre au pied de la lettre. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il suscite des réponses. Go get'em, tiger !

Mes collègues de gauche au bureau.

Les grèves se calment un peu ; le soleil tape beaucoup. Au bureau un collègue a punaisé la photo de deux casseurs en train de se faire tabasser par des CRS, lors d'une récente manifestation de grévistes. Je l'aborde de façon un peu circonspecte (le collègue) : déplore-t-il l'incident ? Est-ce pour la « vigilance » contre les « brutalités policières » ? Au contraire ! Après quinze jours de grève, de trains bondés, ça lui fait bien plaisir de voir quelques fauteurs de trouble prendre des coups. Mais qui ne se réjouirait pas ?

Nelly se prend un bock au Meurice

La première phase de la mission actuelle est fini. A l'heure, en avance même en ce qui me concerne. Le chef semble content. Encore *** qui me harcèle presque pour dîner. Quitte à me le farcir encore, autant que ça soit dans ma cantine, Bd des Italiens. Bien mal m'en prend. Il fait des réflexions sur le barman, et appelle Anne Sinclair une « youpine » au détour d'une phrase. Je crois mourir de honte ; puis de frayeur la seconde d'après. *** croit que rien de ce qu'il dit ne s'entend ; mais la table voisine a très bien entendu et je crois un instant qu'un gars va se lever pour nous mettre son poing dans la gueule. Fort heureusement, rien ne se passe. *** . veut ensuite aller prendre un verre au Meurice. Pourquoi le Meurice alors que nous avons le Concorde St Lazare à deux pas ? Mais il n'en démord pas. Va pour le Meurice. Après tout, ils doivent avoir des cigares.
De fait, ils en ont. Une cave très bien fichue, même. Le problème est que, alors que je biberonne mon puro (un Cedros No 3), *** ne cesse de donner de la voix. Tout d'abord, il veut prendre une tisane. Une tisane au Meurice ! Et pourquoi pas des spaghettis bolognaise chez Lasserre ? Il n'en démord pas ; je dois lui faire la leçon. Il se rebiffe, « je fais ce que je veux ». A force d'insister, il consent à prendre un cognac.
Ensuite, ce sont des réflexions sur le personnel, la décoration, les autres clients, les fauteuils. Mais lorsque ça continue sur « les chiottes en marbre et les robinets plaqués or » qui sont censés se trouver ici, ça devient intenable.
A la fin, il veut absolument visiter tout le rez-de-chaussée du Meurice. Il parcourt des salons vides (et magnifiques), s'assied dans les fauteuils, se relève, fait l'autre fauteuil, franchit une porte, recommence son cinéma dans l'autre salon. Au moment de sortir, nous passons près de deux chasseurs. L'un d'eux dit mezzo voce, « merci pour la visite », d'un ton qui veut dire à la fois « merci pour la visite » mais aussi « nous avons bien remarqué que vous n'êtes pas des habitués du lieu... » *** n'a pas entendu. Il explose : « qui sont-ils, ces gens-là, le client c'est nous, n'importe qui pourrait faire ce qu'ils font, pour qui se prennent-ils » et tutti quanti. Vais-je encore partir lui donner une leçon de maintien ? non, j'en ai marre. Autant faire des dictées musicales à un sourd.

Coteries très fermées (à défaut d’être sélect) : Cigarmania

Soirée cigares avec le club Cigarmania à la Villa Maillot, rejoint par T. Nous fumons un Salomon (de Partagas), avec deux verres d'excellent porto. Le club atteint son numerus clausus ce soir avec les trois derniers membres intronisés ; ce qui sous entend que je ne pourrai pas en être avant belle lurette, c'est-à-dire avant que des places se libèrent. Le programme de l'année prochaine, annoncé, ne mentionne que des soirées à nombre de places limitées, donc réservées aux membres, donc pas à moi.
Lors de mon arrivée (au milieu de trente inconnus, mes commensaux de la dernière fois n'étant pas là), j'ai parcouru la salle, serré une dizaine de pognes : l'impression de déranger les gens au milieu de leur conversation. Toujours seul après dix mains serrées, je me suis posé dans un fauteuil, avec un numéro de Time magazine, et j'ai attendu que les choses se passent. Deux autres novices, aussi perdus que moi, m'ont rejoint. Puis T est venu, et les deux autres sont partis dans un autre coin. Bref, il y a un cercle de copains déjà constitué et le message est qu'on veut bien vous laisser approcher du cercle de temps à autre mais que vous n'en ferez pas partie.
Ma réponse à cette situation, c'est de ne pas persévérer chez Cigarmania
Cigarmania

02/11/2004
Nelly Achlaw




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