Quelques impressions sur le mariage gay



Quelques impressions sur le mariage gay
Je n’ai participé à aucune manifestation contre le mariage gay car, égoïstement, je souhaitais ne point avoir à souffrir le matraquage auquel nous avons eu droit lorsque Vincent et Bruno, les époux de Montpellier, ont échangé leur consentement devant le maire. Sans résistance, sans mobilisation de grande ampleur, ce premier mariage gay n’aurait pu rencontrer qu’une froide indifférence, se serait déroulé sous fond de morosité, de chômage de masse, de déprime collective, de déclinisme aigu, le ravalant ainsi au niveau d’un non-événement. Par mon atonie, négligeant malgré tout l’obligation où je trouve en tant que catholique d’agir dans le domaine temporel, j’avais l’impression d’opposer une résistance plus efficace qu’en battant les pavés, armé de mon drapeau bleu et rose. Je me complaisais, pendant que d’autres veillaient parfois la nuit entière dans les rues froides de la capitale, dans une sorte de détachement, nourri de l’enseignement des maîtres de la mystique rhénane. «Il est bon de savoir renoncer à toutes choses et juste que ce qui est le plus haut soit dégagé de toute image» - «Heureux l’homme qui ne mène pas beaucoup d’actions ni de paroles. Plus il y a d’actions et de paroles, plus il y a d’accidents». Ce sont là deux aphorismes spirituels de Suso, que je m’employais à mettre en œuvre alors que le débat sur le mariage gay battait son plein. C’est dans une disposition d’esprit cioranienne que je souhaitais accueillir cet événement. Ce n’est point tant la rhétorique journalistique qui a troublé ma quiétude. Un moment historique, pouvait-on entendre. Je suis un peu saoulé de l’histoire de France, donc bof… Non ce sont plutôt les protagonistes de ce mariage qui ont excité mon intérêt, puis mon amusement, au-delà de ce que j’aurais pu imaginer. Les mariés, assis non loin du portrait de François Hollande, figé dans sa pose idiote, les deux témoins femmes, soucieuses de tenir au mieux leur rôle, les deux mariés donc, les yeux embués d’émotion, se fixant l’un l’autre d’un air attendri, se caressant les mains avec une délicatesse qui semble bannie depuis longtemps des manières féminines. Je croyais qu’un tel étalage de sentimentalisme, frisant l’indécence, ne restait l’apanage que de quelques catholiques un peu neuneus, de ceux qui n’aspirent rien tant qu’à «mourir d’amour», pour reprendre le refrain d’un poème de sainte Thérèse de Lisieux, dont TF1 a lancé avec force médiatisation l’adaptation musicale. Nous catholiques, nous avons offert au patrimoine de la niaiserie nos traditions sulpiciennes, nos Yvonne et nos Marie-Huguette, les gays nous imposent aujourd’hui leur mariage et leur Vincent et Bruno.

Quelques impressions sur le mariage gay
Les artistes homosexuels avaient le mérite d’entretenir l’art du secret mais aussi une certaine contre-culture, du fait de la marginalité dans laquelle leur orientation sexuelle les maintenait. On ne peut s’empêcher de sourire aux maximes forgées par Oscar Wilde dans sa dernière pièce, L’importance d’être constant. La plus fameuse, ayant trait au mariage, renverse les termes du proverbe sentimental anglais : «Two is company, three is a crowd» qui, transposé, fait dire à Algernon : «Tu ne te rends pas compte, semble-t-il, que dans le mariage, si l’on est heureux à trois, on s’ennuie à deux». Wilde avait face à lui toute la société victorienne, pétrie de convenances et obsédée par la respectabilité. Il fallait donc une certaine forme de courage pour en braver toutes les pesanteurs. Nos marié(e)s de l’an II n’ont pu échanger leurs baisers, devant le portrait de François Hollande et sous le crépitement des flashs, qu’après une mobilisation populaire comme on n’en avait jamais vu depuis plus de trente ans. Les tenants de l’idéologie révolutionnaire ont donc dû contourner le peuple pour parvenir à leurs fins. La Révolution ne cèdera pas un pouce de terrain tant que le monde artificiel qu’elle cherche à instaurer n’aura pas envahi tous les derniers territoires du réel dont on a vu que beaucoup, pas seulement les catholiques, et des jeunes en nombre, ne sont prêts à se laisser déposséder. Le combat du réel et du virtuel, c’est là que doit se situer la confrontation entre la Droite et la Gauche. La Révolution se perpétue donc aujourd’hui contre le peuple. Elle tire sa force de sa capacité à se travestir sous des oripeaux sans cesse changeants. Le Peuple hier, les Droits de l’Homme ensuite, puis maintenant l’Égalité des droits et par-dessus tout le «Droit à l’amour», nouvelle aberration qui nous a valu la scène guignolesque de la mairie de Montpellier, digne d’inspirer les Feydeau des temps nouveaux

02/06/2013
Sombreval





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